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Chronique n°12: Le teen-movie : quand les adolescents prennent leur revanche

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The Breakfast Club (1985) de John Hughes

Le film pour adolescent (teen movie ou teenpic en anglais) est un genre cinématographique, essentiellement comique et nord-américain, ayant pour particularité de représenter une certaine vision de l'adolescence. Les adolescents sont à la fois le public cible et le sujet de ces films. Bon j'arrête de faire mon "Houellebecq" en recopiant des définitions de Wikipédia mais je justifie cet emprunt à la fameuse Encyclopédie libre par le fait que le cadre de l'analyse présente se limitera aux comédies adolescentes. Exit donc la majorité des slashers, représentant des personnages d'adolescents-fonctions, interchangeables (exceptées les icônes du genre dont les plus connues ont été interprétées par Jamie Lee Curtis, Heather Langenkamp et Neve Campbell) et seulement présents pour servir de "chair à abattre" pour le véritable héros de ce sous-genre : le boogeyman. Je passerais aussi volontairement sous silence ces teen-movies censé cibler cette tranche d'âge mais qui ne fait que décrire, avec une condescendance manifeste, une génération de névrosés et de psychotiques. Je n'évoquerai donc rien dans la veine de Thirteen de Catherine Hardwicke ou des films équivalent à Elephant, de Gus Van Sant, dans sa représentation de cet entre deux âges.

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Un âge cinématographiquement négligé

Jusqu'aux années 70, la figure de l'adolescent étaient quasi absente des écrans de cinéma, se cantonnant souvent à des rôles plus que secondaires. En effet, ceux-ci ne représentaient pas un public capable de générer une manne financière jugée suffisante par les grands studios. Il y eu bien des tentatives de prendre pour personnages principaux des teenagers, comme La Fureur de Vivre en 1955 avec James Dean, mais celles-ci restaient trop peu nombreuses pour qu'on puisse déjà parler d'un nouveau genre à part entière. L'émergence durant les 70's de jeunes réalisateurs prometteurs permit à deux oeuvres fondatrices du teen-movie de voir le jour : American Graffiti de Georges Lucas (THX 1138 et Star Wars) et American College de John Landis (Le Loup-garou de LondresThe Blues Brothers), sortis respectivement en 1973 et 1977. Deux approches totalement différente, de ce qui commence à devenir un genre : l'une mélancolique et donc plus nuancée dans son humour, l'autre plus "potache" et irrévérencieuse. Sans le savoir, ces deux réalisateurs, de par leur vision différente de l'adolescence, engendreront donc deux modèles du teen-movie dans les années 80...

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Son nom est Hughes...John Hughes

Alors que le teen-movie avait plus suivi la voie du film de John Landis que de celui de Georges Lucasquitte à caricaturer son modèle jusqu'à en devenir agaçant (la saga des Porky's), un scénariste/réalisateur va changer la donne, John Hughes. Et c'est dès sa première réalisation, Sixteen Candles, que Hughes posera les bases du teen-movie dans ce qu'il a de meilleur : de jeunes acteurs talentueux qui ont à peu près l'âge de leur personnages (il lancera d'ailleurs la carrière de John Cusack, Antony Michael Hall et Emilio Estevez entre autres), des dialogues d'une rare justesse, qui ne sonnent jamais trop écrits et une oscillation entre comédie et drame qui refuse donc de désigner l'adolescence comme une période aux caractéristiques pré-établies, ce que feront d'ailleurs trop de teen-movies par la suite. Les personnages de Hughes ont souvent deux facettes, l'une comique et l'une plus dramatique, s'additionnant pour mieux s'équilibrer.

C'est le cas par exemple des personnages de The Breakfast Club, chef d'oeuvre du genre et chef d'oeuvre tout court. Chacun d'eux nous apparaissent tout d'abord comme des figures comiques, comme le délinquant John Bender, à l'allure et à la répartie cinglante qui cachent finalement une réalité toute autre, plus grave. L'univers de John Hughes est donc peuplé de personnages tragi-comiques, un aspect l'emportant sur l'autre selon les séquences, mais qui fait preuve d'une audace dans la caractérisation de figures jusqu'ici restreintes à n'être que la source d'une soi-disante bêtise, bien de cet âge.
John Hughes aura alors marqué le teen-movie à l'américaine en décrivant des adolescents comme des personnes complexes, apeurées mais jamais découragées par le dur passage à l'âge adulte.





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L'héritage de Hughes

John Hughes arrêtera malheureusement, dans la première moitié des années 1990 de réaliser et écrires des scénarios de comédies adolescentes, dites "douce amères", se cantonnant à écrire des scénarios de comédies familiales plus ou moins regardables, jusqu'à sa mort en août 2009. Mais ce n'est pas pour autant que des oeuvres similaires ne virent pas le jour par d'autres réalisateurs/scénaristes. Un des dignes héritiers des films de Hughes sort dès 1990 : Pump up the Volume, avec Christian Slater, narrant comment un jeune lycéen, ayant créé une radio pirate, se retrouve le porte-parole de tous les jeunes de son établissement et plus largement d'une génération en déroute. Ici, nous avons la même recette que chez John Hughes, le seul changement étant que le film est maintenant ancré dans les 90's là où les films de Hughes restaient ancrés dans les 80's. Cela n'empêche pas que le propos reste universel et qu'il n'est pas spécifique à l'époque où il a été produit.

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D'autres réalisateurs se présentent en admirateurs et fils spirituels de Hughes : on peut citer Kevin Smith (Clerks, Dogma), Judd Apatow (40 ans toujours puceau, Funny People) et Jared Hess (Napoleon Dynamite), qui présentent des particularités similaires aux films du réalisateur de Breakfast Club : une représentation de personnages en marge, mal intégrés à une société devenus absurde de par ses codes et ses contradictions. Malgré cela, des comédies adolescentes plus "légères" et moins pertinentes ont vu le jour, comme le ultra-copié American Pie des frères Weitz, sorti en 1999, et qui se rapproche plus de la saga des Porky's que des films de John Hughes. Un autre essai fera d'ailleurs la synthèse de deux écoles du teen-movie : Superbad de Greg Mottola sorti en 2007. Avec ses personnages dans un premier temps vulgaires et des gags à tendance pipi-caca-sexe mais sa peinture sincère d'une amitié arrivée en fin de course entre les deux adolescents personnages principaux du film. Superbad allie les meilleurs aspects des deux approches de cet âge, offrant alors un spectacle désopilant et parfois désinvolte au propos néanmoins plus intelligent qu'il n'y paraît.



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Alors ce n'est pas par un quelconque chauvinisme que j'aborde la question, mais existe-t-il un teen-movie à la française ? Les multiples essais hexagonaux se rapprochent malheureusement plus des Porky's (Les Sous-doués en tête) que de Breakfast Club, ou ne sont que des étrons filmiques teenagers qui ont l'air de s'être inspirés, pour leur scénario et leur caractérisation des personnages adolescents, de mauvais sketchs de Elie Semoun et Anne Roumanoff portant sur "l'âge bête". C'est dire le niveau ! On notera tout de même quelques réussites comme Le Péril Jeune de Cédric Klapisch ou le récent (et hilarant) Les Beaux Gosses de Riad Sattouf, preuves qu'on peut faire du teen-movie de qualité au pays du système scolaire archaïque...




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